Alors que les instances mondiales du golf (R&A et USGA) traversent leur première prise de conscience sur l’avenir du jeu, et décident d’un retour en arrière pour valoriser les mérites du joueur plus que ceux de son matériel, les fabricants de clubs continuent, quant à eux, à ignorer ces consignes et poursuivent dans le sens qui a fait leur succès : l’illusion que les clubs peuvent compenser l’inconsistance du geste du golfeur.
Bien sûr, au fil des décennies, l’évolution du matériel a grandement amélioré les performances des joueurs : l’invention du cavity-back, l’avènement des têtes de clubs creuses, ou l’utilisation du carbone dans les shafts en sont des exemples flagrants.
Mais il ne reste désormais que peu de chair sur la bête, et les révolutions d’hier ressemblent de plus en plus, aujourd’hui, à des réunions de quartier. De ce fait, dans l’idée que le marketing est la clef de l’adhésion aux causes improbables, un certain nombre d’idées circulent, qui frisent souvent le non sens, voire la contre-vérité.
Le sweet-spot fait partie de ces thèmes qui sont régulièrement mis à mal.
Mais qu’est-ce que le sweet-spot, demanderont les non-affranchis ? Eh bien disons que si vous ne savez pas encore le définir, vous l’avez probablement déjà ressenti. Un peu comme Monsieur Jourdain, à propos de la prose, mais version golf…
Le sweet-spot est l’endroit, dans la face du club, d’où part la balle lorsque vous vous écriez “ fantastique! “ et que la balle vole au-delà de sa distance habituelle, en déclenchant en vous un feu d’artifice d’émotions.
Comme son nom l’indique, c’est le point dans la face qui délivre le ressenti le plus doux, et il s’agit bien d’un point. Il ne peut être confondu avec aucun autre car il s’associe toujours à des performances maximales et c’est pourquoi il est le Graal de tout golfeur, champion ou débutant.
D’un point de vue technique, ce point correspond à l’alignement parfait du centre de gravité de la balle et de celui du club qui la percute, vu dans le sens de la ligne d’objectif, à la fois dans les plans verticaux et horizontaux.
Un objet n’ayant par définition qu’un seul centre de gravité – qu’il s’agisse du club ou de la balle – et la ligne d’objectif étant une droite reliant directement la balle et l’objectif vers lequel est aligné le joueur (le joueur n’étant jamais aligné sur deux objectifs à la fois), le sweet-spot est donc, par définition, unique.
Dans ce sens, le marketing qui entoure les clubs dits à “multiples sweet-spots”, ou à “sweet-spot élargi” est mensonger ou, pour le moins, erroné.
Les fabricants de clubs les plus intègres parlent quant à eux de sweet-spot ressenti, et cela fait une grande différence.
Car si seuls les coups frappés dans le sweet-spot réel délivrent les performances optimales du club, la tolérance actuelle permet une perte minimale des qualités de vol de la balle sur les coups légèrement décentrés tout en offrant des sensations pratiquement comparables. Et c’est sur ce “pratiquement” que jouent les fabricants de clubs, eux qui savent que très peu de joueurs sont capables de faire le distinguo, en termes de sensations, entre ce “pratiquement” et le “précisément”.
Les fabricants misent donc sur la mince irrégularité qui existe dans les coups que vous estimez réussis en floutant la zone de la face de club dans laquelle vos bons coups la percutent. Ils enchérissent, de fait, sur une imperfection que vous ne parvenez pas à identifier ou à ressentir.
Nous parlons donc bien de ressenti, et, malheureusement, à ce sujet, toute interprétation est recevable.
Le point positif restant que, dans le cas des fabricants employant le terme de “sweet-spot ressenti”, il n’y a pas de mensonge.
Pour les plus exigeants d’entre vous, sur ce point comme sur bien d’autres, restez vigilant, et méfiez-vous toujours des contrefaçons.
Franck de Caumette