Dans sa dernière lettre d’information à l’attention des fabricants de matériel de golf, envoyée le 9 Avril, St Andrews a précisé son programme de protocoles, en vue de l’homologation des clubs et des balles, pour l’année 2019.

Au menu, cinq protocoles de tests qui concernent les sujets suivants:

– la façon de mesurer le volume de la tête des bois

– la façon de mesurer le degré d’élasticité de la tête du club

– la façon de mesurer le coefficient de restitution d’une face de club

– la façon de calculer l’Overall Distance Standard en conditions indoor et autres tests de symétrie

– la façon de calculer la vitesse initiale de la balle

Autant le dire tout de suite, St Andrews et l’USGA n’ont pas l’intention de nous laisser nous empâter, bien au contraire! Car une lecture approfondie de leur document nous laisse entrevoir une volonté explicite de neutraliser tout effet trampoline qui serait lié à la déformation de la tête de club en elle-même (et non plus de la face du club uniquement), ainsi que toute velléité de flirter avec le petit pourcentage admis de dépassement du volume général de cette même tête. Par ailleurs, les instances ont décidé de mieux contrôler les COR excessifs (suite aux nouveaux travaux de TaylorMade sur le sujet?) mais également de déterminer les modes de calcul de la distance totale admise (Overall Distance Standard) dans des conditions indoor (qui peuvent influencer favorablement les résultats) et, pour terminer, de redéfinir le Initial Velocity Test Protocol pour être sûr que la vitesse de départ de la balle reste bien sous contrôle…

Si nous ajoutons cela aux normes (déjà très exigeantes) fixées pour contrôler la distance totale parcourable par une balle de golf, nous nous demandons dans quelle direction chercher pour continuer d’améliorer les performances de notre matériel.

En prenant un peu de recul, nous réalisons que le fitting des clubs – si prometteur sur le papier – montre ses premiers signes d’essoufflement car il demande un certain nombre d’efforts pour être réalisé (fitting center ou radar nécessaires pour obtenir le data et personne qualifiée pour le traduire…) et ne débouche finalement que sur un confort qui ne fait pas forcément évoluer les performances du joueur de façon intrinsèque.

Il ne reste donc plus qu’un axe de recherches qui soit quelque peu prometteur, bien que fortement balisé: la balle.

Bien évidemment, les fabricants de matériel ont déjà anticipé l’affaire et nous proposent en masse un fitting de balles, qui est leur dernière marotte et leur dernier coup de génie en matière de marketing.

Lorsque j’ai entendu ces mots pour la première fois (fitting de balles…), j’avoue avoir rêvé pendant quelques secondes. Je me suis imaginé un monde meilleur, à la technologie omnipotente et universelle, qui permettrait à chacun de se faire fabriquer des balles sur-mesure, à la compression parfaitement adaptée à sa vitesse propre et à une composition de l’enveloppe réalisée en fonction de ses attentes en termes de sensations : plus ou moins d’uréthane, plus ou moins de Surlyn, de graphène, ou d’alvéoles pour dessiner le vol de la balle… Et pour être tout à fait honnête, mon moment d’égarement incluait également la faculté de faire varier la taille du noyau ainsi que la densité des couches successives de polymères, tout autant que leur nombre. Cerise sur le gâteau, je rêvais de pouvoir en choisir la couleur, la faire personnaliser et rendre vraiment unique, c’est à dire “faite pour moi et pour moi seul”. Car c’est bien ça le fitting, non?

Une fois confronté à la réalité du fitting de balles marketé – et à la façon à laquelle il est proposé par les divers fabricants -, mon rêve s’est effondré et m’a laissé un sale goût dans la bouche; un goût similaire à celui du cuivre … ou de l’argent.

Le fitting de balle, tel que proposé aujourd’hui, n’est généralement qu’un survol de la gamme d’une marque et son but – au travers de quelques questions banales organisées selon le principe de l’entonnoir – consiste à trouver le modèle du catalogue qui correspond le mieux à la vitesse de passage du joueur, ainsi qu’au “toucher” et à la hauteur de balle qu’il recherche. La méthode serait louable si chaque fabricant de balles avait 150 modèles à proposer dans son catalogue mais ça n’est malheureusement pas le cas. Dans la réalité, en fonction des marques, ce sont généralement 5 ou 6 “familles de balles” (quand ce ne sont pas deux ou trois) qui sont proposées au joueur et il y a peu de chances que l’une d’entre elles réponde totalement et précisément à ses caractéristiques de frappe.

Prenons par exemple, deux joueurs, qui sont respectivement 0 et 24 d’index. L’un est un expert qui recherche des trajectoires basses pour augmenter son contrôle, l’autre est un sliceur dont les balles sont trop hautes du fait de son défaut et qui aimerait également abaisser la hauteur de ses balles. Par pur hasard, il se trouve que ces deux joueurs ont la même vitesse de passage: disons 95 mph. Dans 90% des cas, ces deux joueurs se verront attribuer la même balle alors que leurs besoins sont radicalement différents.

Effectivement, le passage à des balles low spin -celles qui leur seront probablement conseillées- et à forte compression, conviendra parfaitement au joueur scratch mais ne collera pas avec le joueur de 24 d’index qui ne maîtrise pas son angle d’attaque et pour qui guérir de son slice aurait des conséquences tout simplement catastrophiques sur ses futures trajectoires (si ses balles décollent encore!).

Bien entendu, nous parlons de cas relativement extrêmes.

Mais par ailleurs – ce qui est tout aussi embêtant et beaucoup moins imprégné du fitting spirit – si la vitesse de frappe d’un joueur se trouve à cheval entre les gammes couvertes par deux modèles, quelle balle sera-t-elle retenue pour lui? Celle qui est un peu trop dure ou celle qui est un peu trop molle? Ou le fabricant se chargera-t-il de réaliser un modèle spécialement pour ce joueur? Et les séniors, quant à eux, de combien de modèles spécifiques disposent-ils? A vue de nez je dirais Un. Voici donc une séance de fitting qui ne s’éternisera pas pour ces joueurs à la vitesse inférieure à 60 mph.

Au vu de ces exemples, nous comprenons que le fitting de balles n’a de fitting que le nom. Dans les faits il s’agit d’une pure action de fidélisation du client car ce qui marche pour la banque -avec les étudiants, notamment- marche aussi pour le golf : ouvrez votre premier compte chez BONARGENT et il y a 80% de chances pour que cette banque reste la vôtre jusqu’à votre dernier souffle.

N’est-ce pas d’ailleurs l’un des arguments employés lors des tests de fitting de balles? Ne vous dit-on pas que pour profiter au mieux des performances de la balle qui vous est destinée son fabricant vous conseille de la jouer elle et elle seule (ce qui d’un point de vue pédagogique est une hérésie)?

En ce qui me concerne, je vais continuer de faire confiance au “test Franck”* pour choisir mes balles de jeu. C’est une méthode éprouvée qui a fait le tour du monde et qui consiste à faire rebondir une balle sur le carrelage pour vérifier, à l’oreille, si elle me convient ou pas. Bien sûr, elle n’est pas la méthode favorite des fabricants de balles… mais après plus de 40 ans de pratique du golf, elle m’a rarement trahi.

 

FdeC.

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