LIFESTYLE : changer le plomb en or…

Ce coup-là est tenté tous les dix ans en moyenne. Généralement il nous vient d’Asie (mais parfois aussi des USA, ou même de France …) et prétend répondre à une demande hypothétiquement négligée : celle des joueurs (très) fortunés – sportifs et stars en tous genres – qui veulent que leurs cannes de golf soient à la hauteur de leur célébrité et de leur richesse, voire de la délicate subtilité de leur jeu. Dans les faits, c’est un gros mensonge : il ne s’agit qu’un gros coup de com qui compte nous faire avaler la pilule de l’ultra-haut de gamme qui passerait par des matériaux ultra-luxueux et d’une “délicate subtilité” incomprise qui se traduit globalement par des grosses grattes et des vilains tops. Un double mensonge même lorsqu’on sait qu’en 50 ans de pratique dans les lieux de golf les plus exclusifs de la planète, je n’ai jamais croisé le fer avec un manieur de carats… comme si la race avait été inventée. Ce qui serait d’ailleurs tout à fait possible, voire probable. Car tout le monde sait que si le plomb fait aussi bien que l’or pour ce qui est de sa masse, tous deux remplissent moins bien leur office que ne le fait le tungstène au sein d’un club de golf. Et que personne n’a vraiment envie de passer pour un clown au départ du Un avec des clubs que le numéro 1 mondial n’oserait même pas frapper de peur de commettre une boulette (en platine).
Cette fois, c’est HONMA qui a décidé de prendre les joueurs pour des lapereaux. Sa dernière série BERES 5* est proposée à près de 60 000 euros, soit le prix de deux Audi A3 Sportback. Oui, vous pouvez relire…
A ce prix-là, il ne manque qu’un insert en diamant – le carbone ultime – et tant pis pour le sacrifice de l’effet trampoline !
Mais ce qui m’interroge le plus, à vrai dire, ce n’est pas tant l’incongruité du produit (dans la réalité, le série BERES est une bonne série à l’attention des joueurs à très faible vitesse, sliceurs de surcroît) que le fait qu’il soit venu à l’idée d’un fabricant de le mettre sur le marché comme un article de jeu. Dans quel autre sport cela aurait-il pu se produire ? Je ne doute pas qu’il existe des raquettes de tennis incrustées d’Émeraudes. Mais elles servent probablement de trophées, et vous ne les verrez jamais sur un court de Wimbledon, ni dans votre club. Tout comme vous ne verrez jamais de kimono en argent massif, de boules de pétanque en ivoire ou de raquette de Badminton en airain.
Le golf ne serait-il donc qu’un show, une parade dans laquelle il suffit de paraître pour être ?
Au moment même où Tiger Woods est propulsé à la place du Sportif le plus riche de l’Histoire, il serait idiot de croire que ses fans le sont tout autant. Car cela n’est bon pour personne et que ce n’est pas de cette façon que nous ferons passer l’idée que le golf est une bénédiction pour tous.
Les déviances commerciales des fabricants de clubs qui se livrent à cette pratique ne doivent pas susciter l’admiration ni l’étonnement. Car c’est précisément ce que ces constructeurs attendent. Elles ne doivent être vues que comme le reflet exubérant d’un snobisme malsain et dépassé qui colle à nos crampons comme un vieux chewing-gum … en Tritium.

FdeC.