LIV Tour : les champions… en carton.
Malgré la forêt de feux rouges, de stops, et de sens interdits qui ont jalonné sa route, le LIV Tour saoudien vient de s’offrir cette semaine ses premiers tours de roues officiels. Ils se sont produits au CENTURION GC de Londres et ont réuni un champ de joueurs complet (48 joueurs), dans un format de trois fois 18 trous, sans cut. Au final, quatre joueurs du Top 50 mondial ont participé à l’événement, dont les derniers transfuges du PGA Tour que sont Bryson DeChambeau (qui a renoncé au PGA Tour mais ne jouera que lors des tournois du LIV Tour à venir), Dustin Johnson et Patrick Reed, ainsi que quelques amateurs qui auront pour l’occasion touché des enveloppes avoisinant les 100 000 dollars et perdu de facto leur statut d’amateur.
Est-il utile de décortiquer plus encore les raisons de ces départs du circuit PGA pour celui, beaucoup moins noble mais beaucoup plus lucratif, de nos amis du Moyen-Orient ? Certainement pas. Car aujourd’hui les choses sont claires : l’argent proposé par Greg Norman, CEO du LIV Tour, a eu raison du drap de dignité dont bien des joueurs se paraient lors des semaines passées. Autant donc en parler sans détour.
Le LIV Tour a fait des ravages dans le monde du golf au fil des mois. Il a entraîné les joueurs – souvent malgré eux – à prendre parti dans des combats dont aucun ne pouvait sortir indemne. Mais nous avons découvert, au passage, un éclairage nouveau sur le fond de certains d’entre eux et cela donne matière à réfléchir.
De Greg Norman, nous ne parlerons pas. Ce n’est plus un joueur et son égo n’a d’égal que son amour de l’argent, l’histoire l’a déjà prouvé. Il aime tout particulièrement les affrontements polémiques qu’il règle toujours en force. Il s’est permis d’insulter gratuitement le grand Jack Nicklaus (qui, lui, a réellement œuvré pour le bien du golf) et ne mérite que l’opprobre.
Phil Mickelson, quant à lui, a réussi à traverser sa carrière sans que ne soit évoquée son addiction aux jeux d’argent. Quand les déviances concernent le gendre favori de la ménagère américaine, on préfère cacher tout cela et regarder ailleurs. Notons que ce ne fut pas le cas de Tiger Woods, qui pour une autre addiction (au sexe, cette fois) a dû se fendre d’excuses publiques et télévisées… L’adhésion de Phil au LIV Tour était donc inéluctable. Il faut dire que le gaucher joue – et perd – “gros”, selon ses proches.
Pour Bryson DeChambeau, le message que l’imbroglio LIV Tour aura mis en exergue c’est son état de souffrance, voire de déprime. Ce joueur est perdu, il ne se reconnaît nulle part et ne parvient pas à trouver dans le golf ce qu’il était venu y chercher. Son adhésion au LIV Tour pour 100 millions dollars a comme un arrière goût de naufrage.
Pour Kevin Na ou Patrick Reed, nous ne dirons rien car les joueurs du PGA Tour sont ravis de les voir partir. Tout le monde est content, de fait…
Le prix de la naïveté est remporté, quant à lui, par Graeme McDowell. A moins que ce ne soit celui du mépris, c’est à voir… Car tandis qu’il paradait devant les médias pour donner du poids à sa désertion, son “j’espère que cela ne jouera pas contre moi lors de la sélection de la Ryder Cup” a sidéré la planète golf. Graeme est-il idiot ou simplement analphabète? Là encore, c’est à voir…
Enfin, vient le cas de DJ (Dustin Johnson).
Personnellement, son revirement est probablement celui qui m’a fait le plus mal car, comme l’a si justement évoqué Mike Lorenzo Vera lors d’une récente interview, nous pensions tous que, lui, se souviendrait de là où il venait.
Au lieu de ça, DJ nous a sorti une justification pathétique et inacceptable faisant force de loi : “je fais cela pour ma famille…” Nous ne savions pas que les Johnson étaient au bord de l’exclusion sociale et que les parties de pêche au gros du champion ne servaient qu’à masquer sa misère.
Les champions du siècle dernier, qui jouaient pour la gloire, doivent se retourner dans leur tombe.
Mais heureusement pour nous, Jay Monahan, le patron du PGA Tour, est un homme de parole. A l’heure précise où fut tiré le coup de départ du shot-gun du Centurion, dix-sept joueurs furent immédiatement et officiellement exclus du PGA Tour et de ses épreuves internationales.
La partie ne fait donc que commencer. Et lorsqu’on voit la tête que les champions (dont DJ) faisaient en arpentant les fairways londoniens, on se dit que, pour certains, ce LIV Tour est assorti d’une double peine : celle d’être exclus des classements mondiaux, c’est certain, mais aussi celle de jouer avec des adversaires rendant l’expression de leur meilleur jeu peu probable.
Et ça, je ne suis pas certain qu’ils l’aient vu venir…
F2C.